samedi 19 décembre 2009

Burka

Mon neveu et moi regardions la télévision hier soir, avant le dîner. Une récente convertie à l'Islam témoignait à quel point la burka avait renforcé sa liberté de femme moderne.

Mon neveu m'a demandé pourquoi elle était déguisée en boîte aux lettres. Je lui ai répondu, pour m'en débarrasser, que c'était parce que son mari l'autorisait à sortir déguisée toute l'année, pas seulement pour Mardi Gras, où il avait mis son costume de Zorro, ou pour Halloween, où il s'était déguisé en Jean-Pierre Raffarin.

Il m'a demandé si elle était toute nue sous son déguisement, je lui ai répondu qu'il confondait avec les écossais et leur kilt.

Après la génération Y, voici la génération Z.

EF.

vendredi 13 novembre 2009

Vaccin grippe A et réserves gouvernementale

Un des plus importants seniors directeurs de la firme nous a réuni ce matin dans le grand amphi du siège social, afin de communiquer ses consignes officielles au sujet de la grippe A. Quelques journalistes ont même été conviés, pour constater à quel point notre entreprise est citoyenne.

Le message est clair: il faut obéir au gouvernement, il faut se faire vacciner, en priorité. Et que lui, il a donné l'exemple en se faisant vacciner pas plus tard qu'avant de venir.

Un consultant, qui a été licencié tout à l'heure, et qui vient de nous envoyer son message d'adieu, a levé le doigt et demandé si cette politique du "piquez les tous" avait un rapport avec le fait que le Ministère de la Santé était un de nos plus gros client, en même temps que Saventis Medox, producteur en masse du vaccin ?

Le senior directeur allait répondre quelque chose de peu aimable lorsqu'il a été victime d'un violent malaise. Nous savons qu'il est décédé dans l'après-midi, suite à des complications rarissimes dû a un composant du vaccin ; aucun autre détail n'a filtré.

C'était un grand professionnel, un fin politique, et un homme engagé.

EF.

lundi 26 octobre 2009

Lunette Noires pour Air Con

J'ai une mutuelle fabuleuse, grâce à mon entreprise, avec un plafond de remboursement délirant. J'ai pris l'option "aveugle", pour un meilleur remboursement des frais optiques, ce qui m'a permis d'upgrader mes lunettes pour des verres spéciaux qui noircissent à la lumière du jour. On me les a livrées Samedi.

Je les mets chez moi, tout va bien. Je sors dans la rue, au soleil, elle noircissent, impeccable. J'arrive au bureau, je m'assois en réunion... elles restent noires. Je sors précipitamment de réunion, je les passe sous l'eau, rien à faire, elles restent noires. J'appelle l'opticien, qui m'explique que ça arrive parfois, et qui me propose de repasser. Je ne peux pas, il faut que je revienne en réunion, mon boss s'impatiente.

Pour ne pas avoir l'air de me prendre pour Isabelle Adjani, je ne mets pas mes lunettes - ce qui fait que je ne sais pas si on s'adresse à moi, ou à qui je parle. Pour regarder le tableau blanc, je suis obligé de mettre mes lunettes, mon boss me demande devant tout le monde si j'ai pas bientôt fini de faire le con avec mes Ray Bans. J'explique que je me suis trompé en partant de chez moi, que j'ai pris mes lunettes de soleil correctrices au lieu des autres.

Et là, alors que j'explique tout ça, avec beaucoup d'aplomb et mes lunettes sur le nez, elle blanchissent soudain.


EF.

Bali Balo au gouvernement

Un collègue chantait ce matin une chanson paillarde décrivant les explois coquins du fameux Bali Balo.

Moi je dis, si Bali Balo rentre au gouvernement, à la faveur de la politique d'ouverture de Nicolas Kadafi, il va en avoir, des choses à expliquer sur son passé - même s'il s'agit de confessions repentantes.

EF.

vendredi 16 octobre 2009

Corporate US

Le corporate de mon entreprise est basé aux US.

Bien qu'un certain nombre de cadres dynamiques haut-placés (parfois même au board - comité de direction) soient d'origine Francilienne, le gros du gâteau est goinfré par les américains.

L'effet que ça fait ? Et bien, pas plus tard que tout à l'heure, je recevais une communication des dernières nominations à divers postes de direction dans le monde. Tous les nouveaux boss, ou presque, ont des noms d'acteurs porno (Guy Mimore, John Fuckalot, Willy Creampie, Frank Goldmember, Jimmy Deep, etc.)

Voilà l'effet que ça me fait. Et moi, avec mon patronyme de star de la chanson française façon grands boulevards des années 70 (c'est wizzzz), je n'ai aucune chance de finir au board. Et ça me fait bien chier, car j'ai entendu dire qu'on y mangeait vachement bien.

BIZ
E. F.

mardi 13 octobre 2009

Politique d'ouverture

Moi, je trouve ça très bien, tous ces postes à responsabilité qu'on confie à des Sarkozys. C'est super, la politique d'ouverture aux nains.

EF.

mardi 6 octobre 2009

Retraite

Un conseiller 'placement vieillesse' est venu nous voir au bureau, pour parler des régimes de prévoyance complémentaires. Il avait recouvert la paillasse du bocal prêté pour l'occasion de dépliants colorés sur lesquels des retraités dynamiques grimaçaient comiquement leur joie d'être vieux avec du pognon grâce à Prévoyance Conseil.

Un senior directeur est venu nous faire les gros yeux parce que personne ne consultait et le monsieur avait pris la peine de se déplacer. Et c'est tombé sur moi, bien sûr.

J'ai laissé le conseiller finir son baratin, puis je lui ai expliqué que je venais de péter mon assurance vie et mon PEL pour acheter une Lamborgini et que donc j'avais besoin de cash pour l'assurance, donc pas possible de cotiser plus, pour que lui par exemple puisse s'acheter une Lamborgini. Et que merci. Son sourire entendu m'a fait penser qu'on s'était compris.

Et j'ai pu lire le doute dans les yeux des petits vieux sur les prospectus.


EF.

dimanche 4 octobre 2009

Faites tourner.

Je travaille avec une petite boîte de conseil en ce moment, des amis du DSI. Ils sont très sympas, mais ils n'ont qu'un seul neurone qu'ils font tourner comme un joint. Et pas très vite, encore.

Ce matin, le rer s'est arrêté devant moi, la porte s'est ouverte et la petite lumière s'est allumée, comme dans un frigo, m'en révélant le contenu. La SNCF s'est enfin décidé à nous considérer comme des grosses légumes.


EF.

jeudi 1 octobre 2009

L'ennui

Un être vivant est programmé pour s'auto-détruire par le vieillissement juste avant de commencer à s'ennuyer.

Et donc, suivez mon raisonnement, il faut que j'arrête le bureau sous peine d'auto-destruction.


EF.

mardi 22 septembre 2009

Menace

Je me suis encore fait moucher en réunion.

Si j'étais Frankie Machine, le gangster, tout le monde saurait que la fin de la vie devant soi serait de m'avoir après soi.

Mais bon, je suis Édouard Harddrive, je n'oublie jamais rien mais je ne fais pas peur pour autant.


EF

Blindé

Aujourd'hui, j'ai bien mis le bas et le haut du même costard. Il ne peut rien m'arriver.

EF

Précautions

Par mesure de précaution, face à la grippe H1N1, Je ne prête plus mon mouchoir.


EF

vendredi 18 septembre 2009

Rouages des rapports humains

Pour rester dans le sujet, j'ai aidé ce matin à se relever un petit vieux habillé bizarrement, qui s'amusait à prendre les escaliers roulants à contre-sens, en disant bonjour à tout le monde, et qui du coup s'était fait un peu bousculer par un fort à bras que ça avait dû énerver.
- C'est pour rencontrer des gens, m'a-t-il expliqué.
Ça marche, il m'a rencontré.
Mais il m'a fallu prendre congé rapidement, ayant une conf call à 9h.

Tout ça m'a fait penser que dans le métro, sans le savoir, on doit croiser des gens avec une immense valeur humaine... en même temps que leur contraire... mais on ne saurait rien en faire, de toute manière. Pour survivre, on doit s'associer avec des gens qui rapportent de l'argent quelque soit leur valeur humaine. C'est le libre échange.

EF.

jeudi 10 septembre 2009

Roulant

Un vieux m'a dit dans le RER : "c'est un scandale, aucun escalier marchant ne roule dans toute la gare, SNCF c'est vraiment des abrutis". Il était tellement roulant que je me suis demandé s'il me faisait marcher ou pas.


EF

mardi 8 septembre 2009

Tactique

J'ai bien observé JB Groco, un senior directeur particulièrement agressif et donc bien vu. Sa tactique pour avoir l'air 'on the top', c'est le pilonnage intensif. Il faut poser des questions en continu, soit de bonnes questions, soit des questions sans aucuns sens, la valeur de la question résidant en fait dans le ton employé. L'idée est de mettre l'interlocuteur mal à l'aise, en faisant valoir sans clairement l'exprimer qu'à sa place on aurait investigué plus à fond, on aurait mieux creusé le sujet, pour avoir une vision plus complète de la situation, de manière à prendre de meilleures options. Et en même temps, on se donne une image de mercenaire totalement impliqué et adaptable quelque soit le sujet.

Bravo Groco. Encore une belle victoire gagnée par l'application des préceptes introductifs à l'Art de la Guerre.

EF.

Etc

Contribution

Moi aussi, je suis prêt à montrer mes seins dans Marie-Claire si ça peut sauver des vies.

EF.

vendredi 4 septembre 2009

Mode

Ce soir dans le RER, j'ai remarque un pauvre gars qui s'était fait chier dessus son polo par un pigeon... mais un guano ! Genre : 100 grammes.
Il n'avait pas l'air de s'en rendre compte, voire même il semblait heureux, j'ai voulu m'approcher pour le prévenir, et là... ce n'était pas une merde de pigeon, mais le nouveau logo extra-large de Ralph Lauren.

J'ai failli passer pour un ringard.

EF.

jeudi 3 septembre 2009

Orbite

Je me suis vu de l'espace, en songe, suite à un repas trop arrosé. Putain, je ne suis pas bien grand, il me manque des cheveux au dessus. Et mes lunettes épaisses sont monstrueuses. De la lune, on ne voit qu'elles. Il ne faut jamais prendre de la hauteur sans préparation.

EF.

mercredi 2 septembre 2009

Révélations

Je voudrais faire une révélation. Bernusconi n'a jamais trompé sa conjointe. Il donnait secrètement des cours du soir en finance internationale dans des maisons de retraites et hospices nationaux autour du quartier de son enfance.

EF

Jésus et l'informatique.

J'ai rêvé de Jésus cette nuit. Il marchait sur des petits pains et ses doigts jouaient distraitement avec un porte clés Alpha Roméo. Il m'a dit : Édouard, dans un post, tu as suggéré que j'aurais pu faire de l'informatique. Mais non, Édouard, je n'aurais pas pu, car vois-tu, en informatique, contrairement à la réalité, il n'y a jamais de miracles.
Il est marrant, non, Jésus ? Je me suis réveillé en ricanant, et je me suis fait engueuler par ma femme qui dort beaucoup en ce moment.

EF.

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Identité

On m'a conseillé de mieux m'expliquer, d'aider les lecteurs à agréer ma démarche. Alors voilà, je suis Edouard, je travaille pour le cabinet de conseil en déploiement de systèmes informatiques LOGIPEC, qui emprunte à la culture française et anglo-saxonne ce qu'elles ont de mieux. Je voyage tous les matins en transports en commun, étant moi-même particulièrement commun, je m'y raconte des histoires cochonnes avec des filles imaginaires, ce qui me met dans de bonnes dispositions pour mes journées. Je mesure 1,70 mètres, et mes lunettes épaisses font passer mes yeux pour plus grands qu'ils ne le sont réellement.

Je pense que j'aime sincèrement mes contemporains du RER.
Si Jésus Christ devait faire de l'informatique, on serait proches copains.

EF.

lundi 24 août 2009

Charlie et Lulu, respectivement Directeur et Contrôleur Usine.

La condition inhumaine des toutous Argentins

Je suis de retour en Argentine.

Dans la voiture avec chauffeur qui m'emmenait vers l'usine (Warhol disait que chacun aura son heure de célébrité, moi j'ai mon heure grosse légume), en traversant une banlieue pauvre de Buenos Aires juste avant la zone industrielle, ce que j'ai pu voir m'a fait dresser les cheveux sur la tête.

Les occupants d'un petit pavillon avaient enfermé leur chien sur l'appui de fenêtre, entre le double battant et les barreaux. Le toutou, de grande taille, ne pouvait plus bouger. Le pire, c'est qu'il avait l'air de trouver ça tout à fait normal, poursuivant sa mission de garde, très alerte, regardant consciencieusement à droite et à gauche pour voir s'il y avait du danger (il pouvait juste passer la tête au travers des barreaux).

Lorsque j'ai raconté ça aux collègues Argentins, ils ont eu l'air de trouver ça sinon normal, du moins habituel. Ici, les citoyens sont endurçis par la souffrance. Moi, je reste traumatisé. J'ai sans doute trop d'empathie pour le chien. Le chien est forcément trop con pour se rendre compte. Trouve-t-il ça normal ? Il ne connait rien d'autre.

Ou bien, inconsciemment, je fais peut-être un parallèle exagéré avec ma propre situation. Qu'est-on prêt à accepter par la force de l'habitude ? Mes conditions de travail m'éloignent de l'état de nature, de même que ce toutou qu'on empêche de courir en l'intégrant à la façade de la maison. Le chien devient un ornement mural fonctionnel.

Le consultant en système d'information est-il virtuellement un composant déraciné qui perd son Moi en gagnant sa Fonction ? Ma désincarnation progressive est-elle une conséquence inévitable de mon encastrement dans le circuit professionnel, le traitement de l'information ou la stratégie IT ? Et en plus du reste, je n'ai même pas de monnaie locale pour pouvoir tirer un capuccino à la machine à café du coin.

EF

jeudi 20 août 2009

Auto-régulation sociale et suicide collectif chez les chiens de prairie

J'entends aborder ici un sujet lourd : la surpopulation.

J'ai vu dans un reportage animalier que les chiens de prairie (sorte de grosses marmottes américaines de plat pays) pratiquent le suicide collectif : lorsque la densité de population dépasse un certain seuil par mètre carré de touffe, ils migrent vers le littoral et se jettent littéralement à l'eau, par paquet de plusieurs milliers, et ils se noient.

Alors la question est :
- comment se déclenche ce mouvement de foule chez les rongeurs ? Est-ce une envie collective irrépressible ? Ou bien un leader naturel (ou plusieurs) est chargé de communiquer d'une manière ou d'une autre son mal de vivre aux autres, entraînant tous ces millions de baigneurs à sa suite ?
- la compréhension de ce type d'impulsion animale pourrait-elle aider à mieux cerner les motivations des extrémistes islamistes ? Le sujet étant un Ousama Ben Marmotte théorique en tant qu'élément catalyseur de la psycopathologie de groupe.
- serait-il possible d'induire ce genre d'autorégulation au sein d'autres population, comme celle des consultants ?

Bien à vous,
EF


Merci à ED d'http://auto-ed.com/blog/ pour son support.

mardi 28 juillet 2009

Bruno Le Peyral

Bruno Le Peyral est un senior directeur très charismatique et plutôt malfaisant.
On l'appelle Bruno La Peridurale, parce que tu ne sens jamais rien quand il est entrain de t'enculer.

EF

Usine, Buenos Aires, soleil

mercredi 22 juillet 2009

Interphonie télétranscriptive électronique

La télématique incohérente des communications interentreprises dans les secteurs semi-industriels amène souvent les services mercatiques à considérer l'implémentation de système bi-partites CRM et interphonie télétranscriptive.

J'expliquais ça à une superbe consultante à forte poitrine, qui attendait pour passer un grand oral chez un client avec moi. Je ne suis pas sûr d'avoir marqué des points.

EF

dimanche 19 juillet 2009

Zombiaque

François-Henri est de toutes les réponses aux appels d'offre client. Il travaille jour et nuit, sa santé et son aspect se dégradent de jour en jour, on dirait Benjamin Button jeune. Comme disait sa copine avant de le quitter, il joue un rôle de décomposition dans un film de zombies. Il va terminer dans une chaise roulante comme certains champions cyclistes qui ont trop versé dans la chimie amusante.

Ou alors, il ne tient qu'à moi d'abréger ses souffrances, en le poussant dans les escaliers. La question est : jusqu'où peut aller la sollicitude ?


Ed.

samedi 18 juillet 2009

Dîner de youNcon.com

J'ai rencontrés des cons comme moi sur youNcon.com.

EF

Conversation avec mon chauffeur

Je parlais du chiffrage des projets informatiques au chauffeur de taxi. Je lui expliquais comment on fait le maximum pour être rigoureux, mais qu'il y a beaucoup de paramètre difficile à maîtriser et qu'à un certain moment, on s'en remet à Dieu. Le taxi m'a repondu que si Dieu était bon en chiffrage il n'y aurait pas autant de cons.

jeudi 16 juillet 2009

Qui veut des nichons ?

Tout à l'heure dans une librairie de Buenos Aires un couple se disputait en écoutant leur bébé pleurer.
Le gars : tu vois pas qu'il pleure !
La fille : et alors ?
Lui : ben sors un nichon !
Elle : mais non, c'est pas l'heure.

Moi si je pleure, personne ne sortira de nichon, car je ne suis ni un bébé ni une star du rock. Voilà, je progresse dans l'acceptation de moi.

mardi 14 juillet 2009

Moi moi moi

Je suis :
- un lavabo avec deux robinets d'eau froide,
- ce chien que j'ai vu tout à l'heure, assis les papattes à 90°, qui regardait les voitures et camions danser dans la rue,
- un tueur à gages qui a touché l'argent mais qui a oublié qui il fallait tuer. Et pourtant j'en connais qui pourraient se faire tuer que ça me ferait du bien.

Cerveau

J'ai lu dans un livre que le cerveau ne vallait pas toujours la membrane sur laquelle il est imprimé.

vendredi 15 mai 2009

Formation sur les Styles Sociaux

Avec la récession viennent le temps libre et le temps des formations.

Des formations en management, aux outils de gestion, à l'organisation, en psycho-sociologie, en cuisine et en langues du futur (beaucoup de jeunes requins apprennent le chinois en ce moment).

On parle beaucoup des styles sociaux dans mon entreprise, car maîtriser les styles sociaux c'est mieux mettre les gens sous contrôle, c'est travailler son aptitude à les manipuler. Je me suis donc inscrit en formation sur les styles sociaux.

Pour maîtriser les styles sociaux, il faut d'abord bien concevoir ce que les attitudes (langage corporel) et les paroles verbales (langage linguistique) révèlent ou pas de la personnalité sous-jacente. Pour le faire comprendre, cette formation en management très sérieuse compare, dans les premières diapos, l'être humain à un pâté en croûte : on ne voit que la croûte, on ne sait pas de quelle nature est la farce. En regardant le formateur, je me suis dit que les croûtes de certains pâtés donnent tout de même une bonne idée de ce qu'il y a à l'intérieur.

L'analyse des comportements doit se faire selon 2 axes principaux, l'assertivité et l'émotivisation. L'assertivité est un néologisme pour parler de la mesure scientifique de la tendance qu'ont les collègues à poser des questions ou au contraire à affirmer sans preuve. L'émotivisation est un néologisme pour parler de la tendance des collègues à mettre de l'émotion ou à réagir métalliquement durant les débats en réunion. C'est très facile, et ça permet de plier dans 4 boites 99% des homos consultantus et informaticus : +/+, -/-, -/+ ou +/- sur les deux axes. C'est du ready-made pour taxidermiste psycho-social.

Le formateur s'est posé fier de lui à coté d'une courbe de la productivité rapportée à la tension régnant sur un projet. La productivité est optimale à un certain niveau de pression, au delà et en deçà duquel la productivité diminue. J'ai donc bossé 10 ans avant de trouver un prix Nobel pour m'expliquer qu'il faut un peu faire chier, mais pas trop, pour que ça avance. Attention : le mode de réaction du sujet à la pression diffère en fonction de son positionnement sur les axes sus-évoqués, CQFD, DTQ. Et aussi, des relations dites toxiques, en phase de tension, peuvent se mettre en place entre des personnes appartenant à des secteurs diamétralement opposés selon les 2 axes sus-évoqués. Un directif froid se mettra systématiquement sur la gueule avec un émotif passif. CQFD, c'est dans la boîte. Le formateur réagit très mal à une question que je pose, me positionnant façon analytique / froid (scepticisme). Il se réfugie dans l'agression, façon directif / émotif. CQFD, ça marche, c'est dingue.

Sauf que dans mon entreprise, systématiquement peuplée de directifs froids, les conflits sont permanents, et froids, et l'ambiance est globalement toxique, je ne sais plus quoi penser. Le formateur avait anticipé ma question, et nous distribue une matrice donnant le meilleure mode d'interaction général entre les différents styles. Et que donc les relations toxiques peuvent survenir pour toutes les combinaisons possibles. Et inversement.

Jean-François Philou demande s'il ne manque pas une case surpeuplée, celle des cons ; je lui réponds qu'il n'a rien compris, que les cons se distribuent sur toutes les cases. Le formateur dit que oui, mais s'il vous plaît, soyez compréhensifs.

Globalement, le secret est qu'il faut faire preuve de versatilité, c'est à dire qu'il faut s'adapter au comportement des autres. Jean-François propose de monter sur l'estrade et de montrer ses fesses, pour donner l'occasion au formateur de faire une démonstration de versatilité.

Le formateur écarte les bras façon Jésus Christ, devant une diapos qui explique : "connaissez-vous vous même. Contrôlez-vous. Connaissez les autres".
- et "contrôlez les autres" ? Je demande, innocemment;
- s'il vous plaît, soyez compréhensifs, de ne pas, merci, répond le formateur.
- voisin, vous avez une poutre dans l'oeil, explique Jean-François.

Ayant été expulsé avant la fin de la formation, je n'ai pas pu noter les recommandations finales, mais j'essaierai de récupérer, pour la mettre en ligne, la matrice d'interaction par type de con.


Pour être averti de toute publication: mailto:informatique.moderne.update@gmail.com

mardi 12 mai 2009

Lettre ouverte à Grattounette, neveu, musicien, veinard

Cher Grattounette,

Il est temps que tu comprennes ta chance, toi qui jamais ne bossera dans l'informatique de gestion, et qui jamais ne mettra de cravate en dehors des mariages, des bar mitzvahs ou des baptêmes. Car on a qu'une vie, et pour l'instant, c'est qui qu'a tout bon ? C'est Grattounette.

Alors profite, gratte des chansons, sur les cons qui sont heureux et que ça te rend triste, sur les marmottes qui s’enculent dans les terriers, sur le soleil qui continue à dessiner des auréoles sous les bras des grosses quelque soit le budget R&D chez Rexona, sur ce que tu veux réussir pour te payer une Rolex comme Séguéla, sur la vie des cosmonautes qui chient dans des boîtes en orbite (du moins, on l’espère), sur les manipulations génétiques qui vont faire qu’un jour ta copine aura peut-être trois nichons (c’est de ton âge d'y penser), sur la pollution qui fait que bientôt tout le monde ira à la plage à pied quelque soit où il habite, rapport à la montée des eaux ; sur les programmes télé qui montrent que ce qu’on a envie d’entendre, sur la place des chiens d’aveugle dans la société, sur les dangers de l’eau au volant, sur les délits d’initiés et que ça fait chier tout le monde de jamais être initié, car ainsi qu'il en est de la lettre de Saint-François d'Assises aux banquiers:
"que je ne cherche pas tant :
à me rémunérer, qu'à rémunérer mon client
à me servir dans la caisse, qu'à faire fructifier le pognon,
à jouer avec le feu, qu'à placer pépère,
à préparer ma retraite avant l'heure, qu'à garantir celle des vieux,
car c'est en enrichissant les autres
qu'on s'enrichit réellement,
vu qu'on laisse tout au dessus du sol
au moment de passer dessous. "

Alors voilà, merci pour nous, et cordialement pour pas dire plus,
Tontounette.

http://www.myspace.com/quentiiin

Pour être averti de toute publication:
informatique.moderne.update@gmail.com

lundi 27 avril 2009

Allégorie de la conscience intellectuelle perdant pied

Allégorie de la conscience intellectuelle et du sentiment d'éveil professionnel perdant pied au cours d'une réunion interne somnifère provoquant la déconstruction systémique de la motivation subalterne par le biais de la rhétorique platitudique dite Bullshitéenne, que ce soit de type:
- enculage de mouche en bande organisée (Xtreme Fly Fucking),
- écartèlement capillaire en quatre parts (Johnny Johnny fais moi mal),
- frénésie masturbatoire orientée tripotage coupable de concepts simili business,
- enfonçage inertiel de portes ouvertes (I Want To Believe).


mercredi 8 avril 2009

La réunion de cons

Frank Ivanovich (un ancien du bureau de Moscou), François Blanc, Jean-Philippe Laboule et moi aimons bien monter régulièrement l'équivalent en réunions professionnelles des dîners de cons. Nous appelons ça des réunions de cons, tout simplement. Chacun vient avec son con à ces réunions convoquées dans un but fictif mais réaliste (attention à ne rien improviser).
Nous sommes actuellement tous staffés chez Compobuild, la filiale d'une grande corporation du BTP, spécialisée dans la construction écologique.


Jean-Hubert Porcinet du Beauchamp, un expert en matières fonctionnelles financières, recruté par le client en tant que consultant indépendant, m'a dès lundi matin coincé inexorablement entre la poubelle pour déchets recyclables (ses homologues) et la machine à café. Il m'a expliqué en fronçant les sourcils: vois-tu, Edouard, dans la vie, il faut regarder le beignet, pas le trou. J'ai tout de suite su que je venais de trouver mon con pour la réunion de Mercredi (nous en organisons une par mois). J'explique à Jean-Hubert : "nous aurions besoin d'un expert finance pour relire avec nous un business plan sur le renouvellement des systèmes informatiques et du réseau interne ; le leasing, le plan d'amortissement, le financement, tout ça. En fait, personne encore n'est au courant, donc motus, mais si on a ton support, ça ajoutera du poids au message".
Jean-Hubert bombe le torse, prend un air grave, me regarde par dessus ses demi-lunes :
- Quand ça ? Mercredi matin ? Ecoute, il faut que je vérifie dans mon agenda ; je ne sais plus ce que j'ai Mercredi, mais je dois bien pouvoir vous accorder une heure...
Une heure, ou huit heures, ou deux jours même, je n'ai aucun doute là-dessus.
- Mais c'est super, ça, Jean-Hubert, merci beaucoup. Avec toi dans la boucle, ça va être easy pour justifier de la valeur ajoutée.


Mercredi matin, nous nous retrouvons tous un quart d'heure avant, chacun avec un sourire confiant, sûr d'avoir trouvé le con de la victoire. Je trésaille de plaisir en entendant Jean-Hubert arriver (son business trolley date de sa grande époque à la tête d'un service financier, une des roues est bloquée ce qui fait qu'il trace un sillon caractéristique dans les bureaux qu'il traverse. Ce qui permet de le retrouver facilement quand on a rendez-vous avec lui, et d'arrêter d'en dire du mal quand on l'entend arriver). Jean-Hubert s'installe, et sa façon de se présenter, de réclamer l'agenda du jour, de se plaindre de ne pas avoir reçu le support à l'avance, font que je lis le doute et ma victoire dans les yeux des collègues.
Arrive le con de Frank, Philippe Gilbert, un chef de projet migration de données sur les déploiements Européens, qui appartient à une entreprise concurrente de la nôtre ; le con de François, Jean Bonheur, un expert sécurité du client réputé pour annuler régulièrement les droits d'accès des consultants, et enfin le con de Jean-Philippe, Erwin Scholl, celui qui négocie les serveurs sous-dimensionnés avec les hébergeurs, permettant de convertir la productivité de milliers d'utilisateurs en une centaine d'euros économisés tous les mois sur ses factures. La compétition s'annonce serrée, la matinée, prometteuse.

Et c'est là que tout bascule. Alors que je tente de fermer la porte, un pied s'intercale. Jacques Ducruet, notre patron a tous, s'affiche dans l'encadrement, avec juste derrière lui son propre patron, voire le patron de ses patrons, Christopher Shwartz, le directeur Europe et Asie des ressources Intégration Métier. Ma vie entière défile devant mes yeux, en quelques secondes.
- C'est quoi cette réunion ? Demande Jacques. On peut participer ?
Je réfléchis très vite, mon sort et celui de mes camarades en dépend. Impossible que Jacques soit au courant, et que Christopher soit son con pour la réunion. Un instant le doute m'assaille, mais il n'est pas réaliste de penser qu'un des 3 autres ait été suffisamment diabolique pour monter un traquenard, et proposer à Jacques de rentrer dans notre cercle, sans prévenir personne. D'autant plus qu'il n'est pas étonnant que Christopher soit présent sur un site client. En effet, dans mon entreprise, les très grands patrons montent régulièrement sur le front faire la tournée des popotes. Comme disait un collègue, c'est le management à l'Armoricaine, les homards sortent de leur panier pour venir te serrer la pince.
Je ne me laisse pas démonter, je décline le titre et l'objectif de la réunion, j'invite les deux Seniors Directeurs a entrer et je présente tous les protagonistes. Mes trois collègues m'emboîtent le pas, conduisant la réunion comme si de rien n'était.
Jean-Hubert entre directement dans le vif des sujets qui l'intéressent, piétinant allègrement l'agenda qu'il a réclamé à toutes forces en arrivant, et entreprend de dénoncer et de rectifier tout ce qui a pu se dire jusqu'ici sur ce qu'est un bilan comptable sain, équilibré et bien présenté. Il sort de son sac plusieurs liasses comptables pour les faire circuler. Puis il digresse sur un émission qu'il a vu hier où un historien astucieux faisait le parallèle entre les politiques napoléoniennes et Sarkoziennes.
- En ce qui me concerne, coupe Jean bonheur, le con de François, Napoléon et Sarko, ce sont deux nains, et si j'avais un jardin je saurais où les mettre.
Erwin explique qu'il est hors de question, si on installe des nouvelles machines, que ce soit lui qui gère, car il ne faut pas confondre son métier, qui fait qu'il a les compétences requises pour gérer ce changement, et le périmètre de ses attributions, qui l'obligeront le cas échéant à se limiter à un rôle de conseil interne.
Philippe Gilbert signale qu'il est heureux de donner son avis sur les questions liées au transfert de données, mais qu'il y a de forte chance qu'il soit passé directeur de programme à l'époque où la mutation des systèmes sera actée. Je me retiens de répondre que ça ne pourrait arriver que dans le cadre d'un outsourcing total de la fonction informatique par Compobuild. L'outsourcing est une invention géniale de la fin du 20e siècle, qui permet aux très grosses entreprises de se débarrasser à moindre frais des leurs éléments les moins productifs, parfois en leur faisant miroiter des promotions systématiques dans les structures d'accueil. Dans notre jargon, on appelle ça les charrettes de cons. Certaines SII et quelques cabinets de conseil, qui normalement ne font que gérer ces deals d'outsourcing, commencent aussi à proposer des transferts à leurs propres personnels, dans ces structures montées en coopération avec leurs clients. Dans notre jargon, il s'agit alors d'une double charrettes de cons avec effet win-win.
Jean Bonheur montre sur son iphone une vidéo de Beyonce à Christopher, en expliquant, ne trouvez-vous pas, qu'elle danse comme une épileptique qui aurait envie de pisser ou de se faire ramoner le fion.
Christopher, qui a l'habitude des techniciens système, explique sans se démonter qu'il n'est pas fan de danse moderne mais qu'effectivement les poses de la demoiselle sont clairement équivoques.
Je réussi à m'imposer pour discourir bièvement autour de la diapo d'introduction. Christopher me pose quelques questions, auxquelles je réussi à répondre tant bien que mal, pris d'une soudaine et salvatrice inspiration. Christopher conclut que c'est une excellente initiative et se tourne vers les participants pour les inviter à donner leur avis.
Suite à une mauvaise manipulation de Jean Bonheur sur son iphone, Beyonce se met à hurler ses envies diverses à tue-tête. Jean s'excuse et range rapidement son appareil, avec un air de gamin qui aurait peur qu'on lui confisque son jouet.
Jean-Hubert, mon con, se met à disserter sur ce que doit prendre en compte le calcul du ROI, le retour sur investissement, Return On Investment en anglais (Jean-Hubert a le même accent que Peter Sellers en inspecteur Clouzot dans la panthère rose). Et forcément, le ROI n'est pas du tout ce qu'on s'imagine communément.
Je pense personnellement avoir pris l'avantage avec mon Jean-Hubert à moi, qui est définitivement une bête de concours. Nous décidons généralement du gagnant lors du debrief de fin de réunion, mais il n'est pas difficile de connaître la tendance en cours de session, avec un peu d'habitude.
Au fur et à mesure de la réunion, la stupéfaction et l'incrédulité s'inscrivent avec de plus en plus de profondeur sur les visages de Christopher et de Jacques. Ils se mettent tous deux à transpirer, leur détresse est palpable. Christopher, furieux, regarde sa montre, il la trouve visiblement léthargique ; mes 3 collègues organisateurs affichent une neutralité de marbre.
Jean Bonheur et Erwin Scholl manquent d'en venir aux mains. Jean a entamé les hostilités en faisant remarquer que c'est facile de gérer l'accès et la sécurité sur les serveurs d'Erwin, où il est impossible de tenter quoique ce soit, voire même de se connecter, vu les temps de réponse. Erwin réplique en expliquant que si Jean est si chiant à sucrer en permanence les droits de tout le monde, c'est parce que c'est le rôle de sa vie, la gestion des accès aux systèmes informatiques, c'est encore mieux que vigile chez Auchan.

Finalement, Christopher se lève d'un bloc, s'excuse rapidement, explique qu'il a un avion à prendre pour rentrer à Paris (pour moi, de la Défense, c'est encore le RER ou l'hélicoptère le plus efficace). Mais il confirme son intérêt pour la question débattue, et il s'attend à recevoir un compte-rendu circonstancié de la réunion et à être personnellement tenu au courant de la progression du dossier. Jacques ne dit rien, car il ne ment jamais ; tout juste explique-t-il qu'il doit suivre Christopher pour finir de voir deux trois points qu'ils ont en instance.

Le debrief de la réunion de cons a été moins enthousiaste que les précédents. Nous n'avons même pas décidé du vainqueur. Comble de connerie, nous nous somme retrouvés obligés de post-rationaliser une présentation, avec un compte-rendu et une liste de points d'actions ; nous nous sommes mis d'accord pour envoyer le mail aux seniors directeurs uniquement, avec en copie de fausses adresses coté Compobuild, pour éviter qu'un des cons (Jean-Hubert, par exemple) ne rebondisse, transférant sa réponse à une direction quelconque pour se faire mousser. Nous finirions par perdre totalement le contrôle de notre modeste blague. Sans compter le risque que tout ça finisse par passer pour une réelle initiative clandestine avec détournement des ressources client... de quoi terminer tous les trois au pôle emploi.

jeudi 2 avril 2009

Perspective de couloirs célestes - la mort après la vie d'entreprise.

Ce matin j'ai rendu visite à un ancien de mes chefs, interné suite à une bavure ; l'agression et la sodomisation durant un comité de direction projet d'un vieux coordinateur fonctionnel utilisateur grincheux. Je fut témoin impuissant de la scène. Jean-Robert Fourtoux, mon chef, en proie a une furie dévastatrice, a enculé sauvagement et en public le vieux cadre moyen, qui avait eu un mot et un sourire de trop à propos de notre capacité à redresser la situation, alors que nous n'avions dormi qu'une moyenne de 5h par nuit pendant les 15 derniers jours. Jean-Robert hurlait comme un dément : "tu le sens bien, là, le Besoin Fonctionnel mal spécifié, dans ta boîte à Suchard, connard ?". 4 solides vigiles avait été nécessaires pour le maîtriser. Le coordinateur fonctionnel poussait des petits cris aigus comme il est expliqué dans la chanson de Brassens, celle avec le gorille. Il est parti en arrêt maladie prolongé, ce qui a débloqué la situation et nous a permis de terminer le projet dans de bonnes conditions.

Jean-Robert est immédiatement devenu une légende au sein de la firme. On lui a proposé un poste au RH, qu'il a du décliner lorsque la Cours d'Appel de Béthunes a confirmé la nécessité de l'interner jusqu'à nouvel ordre. J'essaie de lui rendre visite au moins une fois tous les deux mois, au sein d'une petite clinique psychiatrique spécialisée dans l'internement d'anciens consultants en management et en système d'information. A l'origine, l'institution a été créée pour soigner les troubles traumatiques chez les anciens combattants. A l'accueil on m'a annoncé que je trouverai Jean-Robert assis sur la terrasse au bout du bâtiment.

Parcourant les couloirs qui mènent au jardin, j'ai recueilli édifié les propos sans queues ni têtes des pensionnaires :
- Dans un système hypercube, il te faut un ODS pour mettre en forme les données. Si t'as pas d'ODS, tes données, elles retombent au fond, toutes mélangées. Dans le cube la balayette.
- Non, mais écoute, c'est pas validé. Personne a voulu valider. On ne peut pas passer en production. Si c'est pas validé, je ne peux rien faire. Le statut c'est : non validé. Il faut que le statut soit : validé. Tu comprends le concept de la Validation ?
- Ce mec, il ne vaut rien fonctionnellement. Il ne sait rien faire du point de vue des flux intégrés.
- C'est un flux intrinsèquement pérenne, mais il faut obtenir l'appui du business.
- On ne passe pas au niveau chiffrage du planning contradictoire. C'est dans l'épaisseur du trait, mais ça ne passe pas quand même. Faut savoir où mettre le curseur. Et ça, seul des ateliers adéquations / écarts avec les utilisateurs clés pourront le déterminer. Faudra faire un avenant.
- C'est une implémentation clé, pour un client classé OR, un client du type FONDATION. C'est prioritaire. Prioritaire. LAISSEZ-MOI PASSER, je dois aller implémenter d'urgence. POUSSEZ-VOUS.
- Faut me staffer ! Staffez-moi, je vous en supplie (sanglots) ! STAFFEZ-MOI, bordel, me laissez pas en dispo ! Soyez cool ! Je sais faire tellement de choses ! MAIS STAFFEZ MOI, MERDE !


- Salut Jean-Robert !
Le visage sombre de Jean-Robert s'éclaire en me voyant.
- Comment va la firme ? Me demande-t-il avec un air de conspirateur.
- Eh bien, c'est la crise, vous savez. On a du mal à signer de nouveaux contrats. Mais le carnet de commande reste correct.
Jean-Robert explique à voix basse : " On va aller dans ma chambre. Il y a des anciens de Caplog qui écoutent aux portes, ils essaient de remonter un business avec le fax du secrétariat médical ".
Remontés dans sa petite chambre blanche, Jean-Robert s'est mis face à la fenêtre pour me parler, pendant que j'ai pris place dans l'unique fauteuil.
- Le colosse est à terre, mon petit Edouard. Nous étions des Dieux, nous voilà des feuilles mortes, ramassées à la pelle. C'est le vent du destin qui nous a poussés sur les rochers. Nous étions les goliaths des flux optiques et coaxiaux, nous étions le nerf numérique de la guerre, notre âme au diable et notre cul en vitrine ! Et qu'en avons-nous fait ?
- Je vous ai amené un éclair au chocolat.
- C'est gentil, mon petit gars. Tu peux aussi me faire suivre des Paris-Brest. J'aime bien aussi. (désignant le crucifix au-dessus de son lit) Vous avez vu le petit Jésus sur la croix ? Il a encore maigri, dites-donc.
- Euh.. oui, il n'a pas l'air bien. Mais je ne sais pas si c'est particulièrement à cause de la crise. Et vous, ça va ?
- MAIS OUI, ça va ! MERDE ! Arrêtez de parler comme à un grand malade ! FAIT CHIER ! Comment voulez-vous que je guérisse, si vous passez votre vie à m'enfoncer comme des cons. Je suis senior directeur niveau 3, il ne faudrait pas l'oublier, hein, espèce de petits pousseurs de wagonnets pleins de MERDE.
Un infirmière ravissante, habillée d'une blouse trop petite, rentre sans frapper.
- C'est fini ce raffut ? Monsieur Fourtoux, encore vous ? Vous voulez qu'on arrête les visites pour vous aider à vous calmer ?
Jean-Robert est tout penaud.
- Non, c'est bon, ça va, je retombe, tout va bien.
Après que l'infirmière soit parti, Jean-Robert me confie :
- Je lui brouterais bien la foufoune, à celle-là. Mais pour la séduire, il faudrait regagner le circuit économique. Et j'ai trop pris mes distances, j'y crois plus. Gardez ça pour vous, mais j'y crois plus. Jamais je pourrais m'y remettre, à ces fadaises. Le ridicule me tuerait à tous les coups.

Paradoxalement, je suis reparti un peu revigoré de cette visite. Et de retour au bureau, en circulant au milieu des espaces de travails fermés (et vitrés), voici ce que mis bout à bout donnent les brèves que j'ai entendues d'une porte mal fermée à une autre :
- Ce con, il a voulu plugger deux systèmes transactionnels sur des hypercubes en les hébergeant dans le même serveur Java. Ahr ahr ahr ! Même le client était mort de rire.
- Merci de respecter le processus de validation qui a été mis en place et validé en accord avec lui même.
- Ce mec est un handicapé mental. Il a toujours rien compris aux bases de données relationnelles pour la modélisation des flux intégrés. Il est universellement incompétent.
- Si on veut obtenir la validation du re-engineering du flux, il faut faire avec la power map chez le client. Sinon on va se prendre le mur.
- On ne passe pas avec ce chiffrage. Je ne me commite pas avant la fin des ateliers d'évaluation. Sinon, ça va tout phagocyter la marge.
- Ouais, ben tu m'expliqueras comment tu fais pour sortir une ressource d'un client global classé platine.
- Faut que tu me trouves une mission. J'ai trois mois pour charger sur un deal, sinon il m'a dit que moi et ma gueule de péruvien on était bon pour jouer de la flûte de pan dans le métro.

mercredi 1 avril 2009

Chacun cherche sa place

Avec la crise, que j'aime bien, le rythme de travail est devenu nettement plus humain. Pour la première fois de ma vie j'ai "chargé en dispo", c'est à dire que je suis disponible mais qu'aucun projet client ne m'utilise. En le disant comme ça, mon statut de ressource saute aux yeux. Pour ne pas dire autre chose.
Et donc périodiquement, le service des feuilles de temps me contacte, pour voir si des fois les heures que j'ai chargées en dispo ne sont reclassifiables, si vraiment je n'ai pas travaillé en sous-main pour un senior directeur quelconque qui aurait oublié de me donner un compte à charger. Je travaille dans une entreprise bien gérée, et j'ai les boeufs-carottes (internal affairs) aux fesses. Ce qui pourrait très bien se finir au Pôle Emploi, en tenue Business Casual, si mon "taux de chargeable"( proportion de mon temps facturé à un client ou un compte interne) descendait en dessous de la température annale du CEO, soit 35%.

"Dans cette firme" m'expliquait un ami Manager Confirmé, "il y a plus de thermomètres que de trous du cul". Ce qui fait énormément de thermomètres, soit dit en passant.

Un petit con d'analyste, genre bébé, jeune diplômé, veut s'asseoir à ma place dans l'open space, sous le prétexte que le service de placement lui a réservé cette chaise spécifiquement (nous sommes installés par paillasse de 3 personnes et aucune des chaises à roulettes n'est attribuée à une personne fixe. Il faut réserver au moins un jour à l'avance). Je lui dis d'attendre un petit quart d'heure que je termine, sauvegarde et que je me déconnecte ; il arrache aussitôt le câble réseau de l'arrière de mon portable en me disant que c'est bon, c'est déconnecté. Je ne me laisse pas décontenancer, je range tranquillement en parlant de chose et d'autre d'un ton badin, j'attends qu'il ait déballé son matériel, qu'il se soit connecté, puis je renverse mon café sur le clavier de son portable en m'excusant. Pendant qu'il est parti en pleurant au service informatique, je vide son sac du haut du balcon dans le jardin d'hiver, et merde, je n'avais pas vu qu'il avait laissé son iphone dedans.

Je me rassois tranquillement et j'entreprends de revoir mon plan projet version 1.9, à nouveau rejeté. Pas facile de se concentrer :
- Putain ! Hurle Françoise Verdun, à l'attention de Jean-Paul Bernard, t'as envoyé les slides pour Empilard Express en te mettant non seulement Chef de Projet tout seul, et aussi tout seul au Comité de Direction Projet ? Et moi, tu m'as mise en responsable de la construction système ? Mais t'es un enculé ! Et en plus, t'as même pas participé à l'avant-vente !
- Ben, ouais, mais je t'ai mise en copie, répond Jean-Paul.
- Tu m'as mise en copie ? Ah bon ? Eh bien, moi, je te mets tout court, connard !
Il repartent chacun dans leur espace clos. Jean-Paul sors furieux du sien au bout de dix minutes, et ouvre d'un coup de pied celui de Françoise.
- La vache ! T'as envoyé un correctif au client sur l'organigramme de projet ? Tu m'as sorti du comité de direction et tu m'as mis à la gestion des habilitations ?
- Ben ouais, mais je t'ai mis en copie, répond Françoise d'une voix nazillarde.
Jean-Paul se rue littéralement sur son clavier. Il ressort au bout de 5 minutes.
- C'est bon, Françoise, c'est réparé. J'ai écris au client qu'étant enceinte, tu ne pourrais finalement pas participer au projet du tout, de manière à éviter un changement d'équipe en milieu de construction système.
- Putain, mais quel enculé !
Jean-Loup Davonier, le Senior Directeur en charge du compte Empilard Express, déboule rouge de colère.
- Bon, j'ai reçu un coup de fil du DSI d'Empilard Express. Il dit qu'il en a marre de nos conneries et qu'il a signé avec Polystème Conseil. Alors, vous nous avez TOUS LES DEUX fait perdre 4 millions d'Euros ; donc faute grave, virés, tous les deux, vous allez rendre votre PC, votre téléphone, votre badge ; le préavis c'est cadeaux, vous DEGAGEZ.
- Je m'en fous, répond Françoise, ça me va bien, j'attendais que ça, de me barrer de cette boîte de merde.
- Mais ouais. Et en plus, tu pues de la gueule façon radioactif, Jean-Loup, c'est pour ça que t'es niveau 4 depuis 10 ans et que tu signes jamais rien, explique Jean-Paul. Viens, Françoise, je te paye un verre pour fêter ça.
- Avec plaisir, répond Françoise, en ramassant ses affaires.
Jean-Loup Davonier les regarde partir bras dessus, bras dessous, avec une moue dégoûtée. Il s'assoie sur un coin de la paillasse où je me suis installé, le regard vide. Il est tiré de sa torpeur par Hypolithe Flannel, un beau parleur arriviste et incompétent, expert dans l'art de faire faire son travail par les autres.
- Heu, Jean-Loup, problème : j'ai envoyé un mail à Cosmic Cosmetics, pour leur expliquer que Françoise ne serait pas chef de projet, vu qu'elle nous quitte ; je t'ai vu la virer, et t'as bien fait, c'était une chieuse. J'ai bien fait, hein, tu m'as dit de prendre des initiatives ? Et donc, je me suis proposé à sa place ; mais ils ont répondu qu'ils partaient signer avec Logilog, parce qu'ils sont capables d'aligner des équipes stables. J'ai rien fait, mais bon, je suis embêté, hein ? 3 millions, en ce moment, c'était bon à prendre...